Newsletter 16/- Juillet 2013
Il ressort de notre rapport d’activité de l’année 2012 et de nos statistiques, que 18% des femmes ayant contacté l’association, sont confrontées aux troubles de la fertilité. Nous consacrons de ce fait l’intégralité de notre lettre d’information de ce trimestre aux fausses couches. Une fausse couche est une interruption spontanée de la grossesse survenant le plus souvent au cours des trois premiers mois.
Selon la littérature, une grossesse sur cinq se termine par une fausse couche avant la fin du premier trimestre: soit 15% environ des grossesses. Près de 70% de fausses couches précoces sont liées à des anomalies d’œuf et 30% environ à une pathologie utérine telles que les fibromes, ou à des problèmes hormonaux, une maladie infectieuse ou virale.
S’agissant des fausses couches à répétition, les causes les plus fréquentes, soit 20 à 25% des cas, sont elles aussi généralement liées à des pathologies utérines: fibromes et endométriose ou à une insuffisance ovarienne. Les adhérences post-opératoires peuvent également être responsables de fausses couches. Pour les femmes qui ont le malheur d’y être confrontées, ces moments particulièrement difficiles, sont sans commune mesure avec d’autres, l’épreuve la plus redoutable à affronter dans le parcours souvent semé d’embûches, qui même à la maternité.
Face à la violence de la déflagration du sac gestationnel et l’expulsion dans d’indicibles douleurs, de ce bébé désormais sans vie, le corps objet de désir et réceptacle de la vie, se transforme alors en repoussoir, sépulture et lieu de deuil. On parle de fausse couche précoce, lorsque l’arrêt de la grossesse se produit avant la douzième semaine; et au-delà, on parle de fausse couche tardive ; avec passage obligé en salle d’accouchement pour les unes, et bloc opératoire pour les autres en vue d’une aspiration ou d’un curetage, en cas de fausse couche spontanée incomplète. Nous dédions ce dossier spécial et la fiche thématique qui s’y rapporte, à tous nos petits anges qui se sont envolés à jamais. Angèle MBARGA Présidente de FIF
Ma première fausse couche est survenue à 6 semaines d’aménorrhées, j’avais 36 ans. Lors de cette première grossesse obtenue si difficilement après deux ans de combat, j'ai constaté un jour que j’avais des saignements étranges. C'était la deuxième fois au cours de cette grossesse. Les premiers saignements avaient eu lieu en Espagne où nous étions en vacances et nous avaient conduits aux urgences sur place. Il nous avait alors été dit, après réalisation d’une échographie qui ne montrait rien d'alarmant, de vivre notre vie car ces saignements n’auraient aucune conséquence fâcheuse sur la grossesse.
C'est donc avec le cliché de cette première échographie réalisée à l'étranger que je me suis rendue aux urgences de l’hôpital Bégin à notre retour de vacances. La nouvelle échographie effectuée ne montrait rien de particulier et n'expliquait pas plus que la précédente, les saignements. Je suis rentrée chez moi et c’est là que les contractions ont commencé. C’était à un tel point que je voulais retourner aux urgences, mais j'ai pensé que c'était ridicule dans la mesure où j'en revenais. Ne voulant pas me faire jeter, j’ai renoncé à cette idée. J'ai attendu le lendemain et j'ai eu la chance d'être reçue par la même interne qui m’avait fait l'échographie la veille et là, elle m’a dit: "il n'y a plus d'embryon Madame".
Le choc fut terrible, j'ai été assommée pendant plusieurs minutes. L’interne m'a ensuite dit qu'il fallait expulser le reste du matériel de fausse couche et donc prendre du Cytotec. Je suis allée à la pharmacie et j'ai acheté le médicament. J'ai appelé plusieurs personnes qui étaient passées par là, afin d’avoir leur avis sur cette prise de médicament; cela me semblait la seule chose à faire. J'ai ensuite pris le médicament seule, cet après-midi-là, chez moi. J'avais juste du Spasfon et du Doliprane pour gérer les douleurs. Une demi-heure après, les grosses contractions ont commencé.
J'ai vite compris que cela ne servirait à rien de rester allongée avec une serviette maxi nuit, elles se remplissaient à une vitesse folle. Je me suis installée sur le WC; je me vidais et tirais la chasse d’eau quand je trouvais la force de me lever. La douleur était insupportable! J'ai tellement crié que je suis sûre que tous les gens présents dans l'immeuble ce jour ont pu m'entendre. Et cela durait interminablement; des quintes de contractions se succédaient et amenaient toujours un flot plus important de débris et de sang. Je perdais tellement de sang que je pensais que j'allais me vider sur le trône.
Je voulais appeler mon conjoint pour lui dire adieu, mais je réalisais que je n'avais pas la force de composer son numéro de téléphone. Je me disais que la dernière personne que j'avais eu au téléphone, était une amie qui pourrait envoyer les pompiers si je l'appelais. Mais j'ai tenu bon. Je gérais cet accouchement d'un ange toute seule. Cela a duré de 14h à 17h; une éternité! Par la suite, j'ai eu d'autres épisodes de saignements importants mais avec une douleur moindre. Je me suis administrée des doses de fer importantes pendant un mois car je me savais anémiée, tellement j’avais perdu de sang.
Ma seconde fausse couche est survenue à 9 semaines d’aménorrhées; un an après la première. J’avais 38 ans et obtenu cette deuxième grossesse, aussi durement que la précédente. Les taux de BetaHCG ne montaient pas correctement; ils ne doublaient pas. Ils ont fini par atteindre un niveau raisonnable et ce jour de début février, mon gynécologue me dit "tout va bien! L'embryon fait 5 mm et son cœur bat". Nous sommes contents bien sûr. Je commence à lâcher prise, à me dire qu'il faut que je commence à faire confiance au corps médical, que 5 mm, même si cela me paraît bien peu par rapport à d'autres au même terme, il connaît son boulot, je dois lui faire confiance.
Quand l'intuition nous parle. Ce mercredi, j'avais porté mon repas et je prévoyais de déjeuner avec une collègue, mais je me sentais mal. Je savais qu'il n'y avait qu'une chose à faire: aller aux urgences. A l’hôpital Bégin, après avoir attendu un certain temps, je suis enfin reçue par une interne. Elle cherche. Elle me dit qu'elle a vu le cœur, puis elle n'est plus sûre. Elle me dit que l'embryon fait 10 mm mais elle n'est pas sûre. Elle commence à me parler de curetage et en même temps, elle me dit qu'il faut attendre une semaine pour savoir si oui ou non il y a une évolution. Je ressors de là confuse. Je ne supporte pas cette situation de doute, j'ai besoin de savoir si je porte en moi la vie ou la mort.
Je me rappelle la plaque d'un gynécologue près de chez moi avec échographie sur place. J'appelle, je supplie. Il me reçoit et me confirme ce que mon intuition me disait depuis les taux de Beta HCG étranges: "l'embryon mesure 4 mm"! Je n’y crois pas: ce n'est pas possible, il faisait 5 mm au début du mois de février! "Je vais vous donner du Cytotec et un anti-douleur pour éliminer cela". Cette fois, l'anti-douleur sera de la Lamaline avec de la morphine et de l'opium. Je redoutais de vivre encore cette fausse couche toute seule alors que mon conjoint était en déplacement. J'ai prévenu mon réseau de copines; deux sont venues à mon chevet; plus une autre amie. Je ne voulais pas être seule au cas où.
A la prise du Cytotec, le même scénario que lors de ma première fausse couche se produit: les saignements sont importants mais grâce à cet anti-douleur puissant, je peux me déplacer si besoin, au lieu de rester sur le trône. J'expulse le sac sans bruit. Je suis moralement effondrée, mais physiquement, je tiens le coup. Cela dure plusieurs jours. Je retourne voir mon gynécologue habituel qui me demande de reprendre du Cytotec car il y a encore des débris d’embryon visibles. Ce que je fais par voie vaginale. Lors de la 3ème visite, le gynécologue nous dit qu'il y a encore un peu de débris mais qu'ils partiront tout seuls et que oui, nous pouvons partir en vacances, à la mer tranquille.
À mon retour, le retour de couches met du temps à se faire. Je décide de revoir le médecin qui avait pris en charge ma fausse couche. Il m'examine et me dit que je fais une rétention importante et qu'il faut faire un curetage. En plus de ce que j'ai déjà eu !!! On prévoit donc l'intervention le mercredi suivant. Mais j'ai peur pour mon endomètre, alors je fais tout pour que cela parte tout seul. J’ai à nouveau un peu de saignement; mais pas suffisamment pour enlever cette rétention. L'intervention se passe sans soucis. Je me réveille sans saignement et sans douleur. Je regrette de ne pas avoir fait cela depuis le début, cela m'aurait évité cette souffrance en deux temps. Un mois plus tard, j'ai tout de même eu des saignements intempestifs qui m'ont conduit aux urgences de l’hôpital Trousseau. Le gynécologue qui m’a reçue, pensait que j'avais fait une autre fausse couche. Il n'en était rien. C'était du matériel placentaire de ma précédente fausse couche. Les suites de cette fausse couche auront duré trois mois.
La question que je me pose aujourd’hui est de savoir pourquoi le Cytotec est prescrit et préconisé systématiquement en première intention pour les fausses couches précoces alors même qu’il semblerait qu’au-delà d’un certain stade, l'embryon et le matériel placentaire sont souvent trop gros pour s'éliminer facilement et proprement sans intervention chirurgicale. Ne serait-il pas préférable de donner la possibilité aux femmes de choisir entre le Cytotec et le curetage ?
J'ai appris de mes différentes fausses couches que j'étais capable d'accoucher toute seule. Les douleurs des contractions liées à une fausse couche sont semble-t-il, les mêmes que pour un accouchement pour un bébé vivant. Il paraît même que les contractions d’accouchement sont moins douloureuses. Maintenant, je me dis que si je dois accoucher en plein milieu d'une forêt, j’en serais capable. J'ai appris qu'en cas de nombreuses fausses couches spontanées, il n'est pas toujours possible de faire un curetage car ça finit par endommager l'utérus et cela compromet les chances de grossesses suivantes.
J'ai appris que certaines femmes préfèrent être maîtresses de ces moments difficiles plutôt que de ne pas voir leur embryon partir ; être passives et inconscientes en optant pour un curetage. J'ai appris que si c'était à refaire, je préférerais avoir un curetage pour ne pas souffrir le martyr.
Le deuil: mon acupunctrice m'avait conseillé un rituel de deuil, comme écrire une lettre à mon bébé et la brûler ; mais j'ai préféré jeter des pétales de roses rouges aux toilettes en allumant une bougie et en faisant une prière. Le deuil a été difficile. La chute des hormones m’a donné une impression de vide. Croiser des femmes enceintes dans la rue, s'écrouler pour un rien, se sentir à bout de force, perdre espoir, se dire qu'on n'y arrivera jamais, voir son utérus comme un endroit où les bébés viennent mourir, se sentir incapable d'offrir un hôtel 5 étoiles à l'objet de notre désir, se faire aider, en parler, prendre des plantes, dans mon cas, le millepertuis m'aura aidée à me lever le matin.
Mon deuil s’est achevé l'été 2012 au Japon, au cimetière Jizo. Là-bas, il y a un cimetière pour les bébés-anges. Ils sont représentés par une statue que portent les parents endeuillés. J'en avais entendu parler dans un livre sur l'infertilité « Looking for Daisy » de Peggy Orenstein. La visite de ce temple a été très émouvante pour moi. J'y ai brûlé une bougie pour tous mes anges et ça m'a réellement aidé à avancer dans le travail de deuil. J'avais le sentiment d'être comprise. J'ai espéré que mes anges aussi puissent « traverser la rivière » comme ils le disent, à savoir arrêter de hanter notre présent et nous permettre d’avancer vers l’avenir.
J’ai aussi appris qu’il est bon d’avoir une copine pour annuler à notre place, le rendez-vous de l’échographie des 12 semaines d’aménorrhées et l’inscription à la maternité. Et après? Recommencer, y croire, ne pas laisser tomber, trouver un médecin de confiance, se donner les moyens. Je pense que tout cela est nécessaire "car la route tourne maman!" me souffle le petit prince ou la petite princesse, d'un coup de pied sec dans mon ventre. A 39 ans, ma « grossesse précieuse » comme dit ma sage-femme, terme employé pour les grossesses difficilement obtenues, est loin d’être une sinécure! Hospitalisée trois fois pour menace d’accouchement prématuré à cause d’un placenta praevia, sans doute lié au curetage que j’ai subi il y a moins d’un an. Il semblerait que le curetage soit une cause de l’insertion trop basse du placenta, d’où les saignements et contractions. Je dois en plus désormais composer avec un diabète gestationnel. Bébé est attendu pour la mi-août à l’hôpital Antoine Béclère. Ma grossesse est sous haute surveillance car avec l’âge viennent d’autres problème.
Frédérique
Avant que cela ne m’arrive, je ne savais pas ce qu’était une fausse couche tardive, je l’ai appris à mes dépens ! Il s’agit d’une fausse couche qui survient après la 12ème semaine d’aménorrhée. J’ai survécu à ce cauchemar! A l’époque, du haut de mes 27 ans, en 2009, après environ un an d’essais « bébé naturel », je suis tombée enceinte de jumeaux, après ma première fécondation in vitro. Quel bonheur, mais de courte durée, hélàs!
On m’avait diagnostiqué avant ma fausse couche, deux fibromes de 5 et 6 cm; mais selon les médecins, ces deux fibromes n’empêcheraient pas ma grossesse d’évoluer normalement. Bien que mes fibromes occasionnaient de grosses contractions et des saignements, j’avais une réelle confiance dans l’équipe médicale et ceci en dépit du fait que j’avais été à plusieurs reprises hospitalisée. Dans la mesure où j’avais passé avec succès le difficile cap du premier trimestre de grossesse, je pensais que tout irait pour le mieux! Ou plus exactement que le pire était derrière moi. Erreur, je me trompais lourdement!
J’avais de très fortes contractions et après un énième passage aux urgences, l’équipe hospitalière, décida de me garder pour une durée indéterminée. J’étais à 5 mois et demi de grossesse. Malgré les médicaments, la surveillance régulière, l’horreur arriva. Le 27 octobre 2009, mes contractions étaient plus douloureuses que d’habitude.
J’ai appelé depuis ma chambre l’interne de garde qui a pris la décision de me descendre en salle de naissance. Les contractions étaient telles que je m’évanouis. Je n’oublierai jamais le regard de cette interne et la phrase prononcée: « Ma belle, on ne peut plus rien faire, il va falloir pousser….»
Oui ils étaient vivants mes bébés, mais la poche des eaux s’était percée et Mathis et Maxens étaient prêts à sortir. Mon mari était présent à mes côtés, je lui serrais la main en le suppliant de les sauver, moi je m’en foutais pour ma vie: il fallait sauver MES JUMEAUX, même si je devais perdre la vie.
La nature est parfois mal faite ! Il fallait que je pousse sans péridurale, car mon col était déjà trop ouvert. J’ai tout senti, même l’avant-bras du médecin accoucheur qui retournait l’un de mes bébés qui se présentait par l’épaule. Après la sortie du premier bébé, l’horreur recommença, car il fallait que j’accouche des deux bébés. Et c’était reparti ! Cette nuit de cauchemar s’est terminée sous anesthésie générale entre pleurs et cris. Car on n’arrivait pas à décoller le placenta. Malgré ma fatigue, j’ai souhaité voir mes bébés, pour pouvoir faire le deuil. Ils étaient mignons! Petits, certes, mais mignons. Je leur ai dit au revoir en leur demandant depuis là-haut, de garder un regard sur moi et de m’encourager, car je n’étais pas sûre de me remettre de leur perte.
Que s’était-il passé ??? Les fibromes avaient vraiment grossi; ils faisaient chacun 7 et 8 cm: les bébés, le liquide amniotique, mon col ne pouvaient plus supporter cette pression constante, d’où l’accouchement prématuré et la mort de mes bébés. Il y a eu des moments durs, mais aujourd’hui j’ai fait le deuil.
En 2012 j’ai décidé de me faire opérer et d’aller de l’avant. L’opération a été un véritable succès! Après plusieurs fécondations in vitro sans succès, j’ai pris la ferme résolution de me mettre au sport et de faire une thérapie. Quatre ans après ma fausse couche, comment vais-je? Eh oui, je peux dire aujourd’hui que je suis enfin heureuse! Même si je pense que les cigognes ont oublié mon adresse, je continue à surveiller malgré tout le bruit de leurs ailes.
J'ai 38 ans, six fausses couches, une grossesse extra utérine et deux miracles : une fille de bientôt 18 ans et un garçon de 4 ans. Le 10 février 2012, lors de mon rendez-vous de contrôle à 9,5 semaines de grossesse, mon gynécologue a constaté que le cœur de mon bébé ne battait plus. Il a immédiatement demandé une confirmation à son collègue radiologue. Les mots de ce dernier furent implacables : "c'est bien ça". J'avais 37 ans. Abattue, je retourne en pleurs, voir mon gynécologue: "je suis désolé" me dit-il. Là, je lui demande de m'expliquer ce qui va se passer. Il m’informe que l’œuf est trop gros pour être évacué naturellement; il préfère procéder à un curetage. L’intervention aura lieu le 14 février, jour de la Saint Valentin. J'ai donc rendez-vous le même jour avec l'anesthésiste; rdv obligatoire avant toute intervention chirurgicale. Le curetage consiste ni plus ni moins à gratter l'utérus afin qu'il ne reste aucun résidu qui infecterait notre matrice et empêcherait toute nouvelle grossesse.
Je suis entrée à la clinique tôt le matin et ai effectué mon admission comme un robot. A mon arrivée au bloc opératoire, l’anesthésiste a cru dans un premier temps que je venais pour un avortement; en lisant mon dossier son comportement a tout de suite changé. Elle a été plus "douce" avec moi. Je me souviens encore du silence pesant de l'équipe et leur visage grave. Enlever son enfant mort à une femme est une opération terrible; et ce, quel que soit le stade de la grossesse. Ils ont eu la décence de ne pas me mettre les jambes dans les étriers. J'ai tenu mon ventre pour la dernière fois et j'ai dit adieu à mon ange. L'opération a duré une vingtaine de minutes.
A mon réveil, j'ai été accueillie par une infirmière formidable, humaine. J'ai pleuré dans ses bras, devant d'autres patients. Elle n'a rien dit, mais sa compassion m'a apaisée. Je n'ai pas eu de médicament particulier, en dehors du paracétamol que je devais prendre en cas de douleurs. Après le curetage, l'utérus saigne. Selon les femmes, ça peut durer de quelques heures à quelques jours. Autant vous dire que pour une femme porteuse de fibromes, c'est plutôt quelques jours. Mon médecin voulait m'arrêter juste deux jours : le jour de l'opération et le lendemain. Pour lui, je pouvais reprendre le boulot dès le surlendemain ! Après une discussion musclée, il m'a finalement arrêtée pour le reste de la semaine. J'ai dû reprendre le boulot difficilement, une semaine après.
Le deuil a été long, il m’a fallu plus d'un an pour réellement l'accepter. Deux moments m'ont aidée dans ce travail de deuil : une réunion avec les femmes de FIF au cours de laquelle la question du pardon a été abordée, puis il y a eu la visite chez mon gynécologue spécialisé en PMA. Les mots qu'il a prononcés ont été un électrochoc et m’ont permis de reconnaître que j'avais vécu durant l'année qui venait de s’écouler un drame si fort qu'il me fallait du temps pour l’accepter. Et c'est ce que j'ai fait. J'ai accepté. Il faut dire que j'ai perdu mon bébé suite à une chose rare: j'avais été opérée 10 jours plus tôt d'une grossesse extra utérine qui avait rompu ma trompe et causé une hémorragie interne grave. Mon cœur s'était arrêté de battre. Donc j'imagine bien que le tout petit être en moi n'a pas supporté ce choc.
La fausse couche est la façon dont la nature nous dit : cette grossesse ne va pas, il vaut mieux tout arrêter. C'est un deuil à faire, un vrai deuil, celui de l'avenir. Il faut prendre le temps de le faire, mais aussi garder espoir et continuer à se donner les moyens d’atteindre son rêve !
En ce qui me concerne, je suis depuis, suivie en AMP (Assistance Médicale à la Procréation) pour une FIV. La 1ère a échoué en mars dernier, je dois recommencer en septembre. Cependant, je suis en insuffisance ovarienne, j’ai un utérus poly-fibromateux, une endométriose et des adhérences suite à mon opération lors de ma grossesse extra utérine. Je ne suis pas très optimiste, mais bon, peut-être que l'avenir me réserve une belle surprise.
J’étais arrivée à Delhi depuis trois jours. Mes règles avaient du retard que j’attribuais volontiers aux chamboulements liés aux préparatifs de mon départ. Je prenais la pilule, je ne pouvais pas être enceinte. Malgré tout, par acquis de conscience, je me décidai à faire un test de grossesse. Je me souviendrai toute ma vie de ce moment-là ; seule dans les toilettes d’un restaurant, ma bandelette positive à la main. Ce n’était pas prévu! Je venais juste de quitter Paris pour commencer un voyage autour du monde qui devait durer six mois.
J’étais prise dans un tourbillon émotionnel indescriptible. Je ne savais plus ce que je voulais. Seule certitude: je voulais être mère un jour. Mais je sentais au fond de moi que ce n’était ni le moment, ni la bonne relation. Je me suis rendue à l’ambassade de France à Delhi pour avoir le contact d’un médecin pour une éventuelle interruption volontaire de grossesse. Après m’avoir fortement incitée à le garder, le médecin m’a parlé de chirurgie, il ne connaissait pas la pilule abortive. J’ai finalement décidé de garder l’enfant et de continuer mon voyage jusqu’à ce que je ressente le besoin de rentrer en France. Après coup, je me suis rendue compte que mon raisonnement était en pleine errance, que je n’étais pas sûre de la décision à prendre, que je laissais faire la vie. Je ne maîtrisais rien de ce qui se passait. Une seule chose était sûre: je me sentais différente, j’y pensais tout le temps, j’étais sereine malgré tout.
Puis, étant arrivée dans une zone plus rurale du Rajasthan, infestée de moustiques, j’ai fait une recherche sur des forums au sujet des précautions à prendre lorsqu’on est enceinte. Je ne prenais pas de traitement anti-paludéen, et je n’avais aucune idée des aliments que je devais éviter. Là, j’ai clairement ressenti un frisson parcourir mon corps de la tête jusqu’aux pieds. Une heure plus tard je commençais à saigner. J’avais entendu dire que quelquefois, des saignements pouvaient arriver lors d’une grossesse. J’ai voulu y croire, mais je savais que j’étais en train de le perdre. Je venais à peine de me faire à l’idée d’être mère. Il me fallait maintenant accepter la perte.
Une contraction mémorable par l’intensité de la douleur occasionnée, a eu lieu à mon arrivée à Bénarès. Je savais au fond de moi que c’était la dernière, que l’embryon venait de partir totalement. Alors, j’ai recueilli cette dernière partie expulsée; je l’ai enveloppée dans un mouchoir et le lendemain je la déposais dans le Gange, le fleuve sacré où dans la religion hindoue, adultes et enfants décédés voient leurs corps déposés sur radeaux et mis à la dérive afin de sortir du cycle des réincarnations. Vu de l’extérieur, cela peut sembler mystique, mais sur le moment, cela m’a tellement aidé à accepter la perte; et a constitué une étape essentielle dans mon travail de deuil.
L’épreuve était réellement éprouvante. Il fallait que je trouve du sens. Environ trois semaines se sont écoulées avant que je ne consulte un service de gynécologie d’un hôpital privé de Calcutta. Les saignements venaient juste de se terminer. Là, je me suis sentie comme une bête de foire. On m’a dit que quelque chose n’allait pas; qu’une infection pelvienne aurait causé la fausse couche. Plusieurs médecins sont venus tour à tour me voir. Les questions culpabilisantes ont fusé; telles que combien j’avais eu de partenaires sexuels au cours de ma vie. J’étais devenue un cas d’école.
Une couverture antibiotique m’a été donnée et je suis repartie, seule, soulagée de ne pas avoir besoin de curetage, mais angoissée à l’idée d’avoir une infection. J’étais tout de même étonnée: je n’avais eu aucun signe d’infection; et j’avais un suivi gynécologique régulier. Je suis intimement convaincue que l’infection était due à la fausse couche et au temps mis avant de consulter. Je suis plutôt angoissée de nature; en temps normal, je n’aurais jamais autant attendu avant de consulter. Je ne pense pas pourtant avoir été dans un déni de ce qui m’arrivait. Au fond de moi, je savais ce qui se passait et j’avais peut-être besoin de ce temps, seule, pour ressentir mon corps et faire le deuil. Consulter, cela aurait voulu dire intervenir sur la situation. Je n’y étais pas prête.
A ce jour des questions se posent à moi: si j’avais consulté avant, peut-être aurais-je eu un curetage? Aurais-je évité l’infection? Si je n’avais pas consulté les forums, je n’aurais peut-être pas fait de fausse couche? A toutes ces questions, je n’aurai jamais de réponses, mais ce que je me dis c’est que j’ai réagi comme j’ai pu, avec les ressources émotionnelles que j’ai pu mobiliser à ce moment-là. Mon voyage s’est poursuivi au gré des hôpitaux que je croisais: après Calcutta, cela a été l’Hôpital franco-vietnamien d’Ho-Chi-Minh, puis Brisbane, puis retour en France. Les considérations portées à la problématique du bébé ont fait place à des considérations purement médicales.
Au final tout va bien. Mais que de questionnements, d’angoisse, d’incertitudes! Je voulais témoigner pour partager mon expérience. Une grossesse non planifiée, une fausse couche dans des conditions particulières et surtout les montagnes russes émotionnelles qui ont accompagné tous ces événements. A l’époque, tellement j’étais marquée par ce qui m’arrivait, je racontais tout cela à chaque voyageur que je rencontrais, bien qu’ils soient de parfaits inconnus. J’avais besoin d’en parler. Besoin de partager. Mon voyage a duré quatre mois et demi. Être face à moi-même, loin et seule m’a paradoxalement aidé dans le deuil de la grossesse. Je ne regrette pas que cet enfant ne soit pas venu au monde. Évidemment, je l’aurais aimé plus que tout, mais je n’aurais pas pu l’accueillir dans les conditions souhaitées. Au final, j’ai laissé la vie décider pour moi, et heureusement, elle a bien choisi. Isabelle
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Josef Wachtveitl Publications 2006-2013 Amarie S, Arefe K, Starcke JH, Dreuw A, Wachtveitl J (2008) Identification of an additional low-lying excited state of carotenoid radical cations. J Phys Chem B 112:14011-14017 Amarie S, Förster U, Gildenhoff N, Dreuw A, Wachtveitl J (2010) Excited state dynamics of the astaxanthin radical cation. Chem Phys 373:8-14 Amarie S, Lupo D, Len